Délai raisonnable pour contester un permis de construire

Par un arrêt du 9 novembre 2018 n° 409872, le Conseil d’état étend sa jurisprudence Czabaj aux recours contre les autorisations d’urbanisme (CE, Assemblée, 13 juill. 2016, n° 387763).
 
Ainsi, l’affichage incomplet d’un permis de construire (art. R. 600-2 du code de l’urbanisme) ne permet plus de le contester indéfiniment.
 
Le tiers peut le faire dans le délai raisonnable qui est normalement d’un an à compter de cet affichage. Par ailleurs, le Conseil précise que ce délai ne peut pas non plus être supérieur à celui de six mois après l’achèvement de la construction fixé par l’article R. 600-3 du code de l’urbanisme.
 

Le principe d’impartialité et les autorités administratives indépendantes

Par un arrêt du 18 juillet 2018, le Conseil d’Etat réaffirme que le principe d’impartialité s’applique au fonctionnement des autorités administratives indépendantes (AAI), et notamment aux décisions nommant leurs membres.

Mais la Haute juridiction estime, à propos de la Haute Autorité de santé (HAS), que ce principe n’interdit pas de nommer un membre qui aurait eu des intérêts entrant dans le champ des compétences de l’autorité, dès lors qu’elle peut se déporter.

Ce n’est que si cette personne se trouvait « dans une situation telle que l’application des règles de déport la conduirait à devoir s’abstenir de participer aux travaux de l’autorité administrative ou publique indépendante à une fréquence telle que le fonctionnement normal de cette autorité en serait entravé » que la nomination serait irrégulière.

Contentieux de l’urbanisme : régularisation des documents en cours d’instance

Par un arrêt du 22 décembre 2017 (req. n° 395963), le Conseil d’Etat apporte d’importantes précisions sur l’application de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme, permettant au juge administratif de surseoir à statuer en vue de permettre la régularisation d’un vice affectant un document d’urbanisme.

D’une part, il juge que ces dispositions sont immédiatement applicables aux instances en cours, y compris lorsque les actes en cause ont été adoptés avant l’entrée en vigueur de l’article L. 600-9 du code de l’urbanisme.

D’autre part, le Conseil d’Etat estime que le juge doit vérifier si les mesures prises par une commune sont propres à régulariser le vice affectant le document d’urbanisme.

Tel n’est pas le cas lorsque, comme en l’espèce, l’avis manquant qui a ensuite été produit s’est révélé être un avis négatif. L’avis ayant été négatif, il aurait fallu aussi, pour régulariser la procédure, susciter une nouvelle délibération du conseil municipal.

Jugement rendu en dernier ressort contre des autorisations de construire

L’article R. 811-1-1 du code de justice administrative supprime l’appel pour certains recours contre des autorisations de construire en zone tendue.

Le Conseil d’Etat a été amené à préciser le champs d’application de cet article, par deux décisions du 8 novembre 2017 (req. n° 410433 et 409654).

Dans le premier arrêt, il a jugé que l’exemption de l’appel s’appliquait au permis d’aménager un lotissement, même s’il a pour objet la réalisation d’une zone d’activités commerciales et artisanales.

Dans le second arrêt, il a estimé, en revanche, que cette exemption ne s’appliquait ne s’applique ni aux jugements statuant sur des recours formés contre des refus d’autorisation, ni aux jugements statuant sur des recours formés contre des décisions de sursis à statuer.

Sanctions prononcées par l’ACNUSA : application du principe non bis in idem

Le principe non bis in idem, selon lequel un même manquement ne peut donner lieu qu’à une seule sanction administrative, sauf si la loi en dispose autrement (Conseil d’Etat, 29 octobre 2009, Société Air France, req. n° 312825), s’applique aux sanctions infligées par l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA).

La décision du 30 décembre 2016 le rappelle mais, surtout, elle précise la portée du principe.

Celui-ci s’applique « tant lorsque l’autorité avait initialement infligé une sanction que lorsqu’elle avait décidé de ne pas en infliger une ».

Concrètement, l’ACNUSA avait décidé de ne pas infliger de sanctions à une compagnie aérienne car les procès-verbaux qui constataient des manquements à la réglementation de l’aéroport Nice-Côte d’Azur n’étaient pas suffisamment précis. De nouveaux procès-verbaux, se rapportant aux mêmes faits, ont été établis et, sur cette base, par d’autres décisions, l’ACNUSA a décidé, cette fois, de prononcer des sanctions.

Le Conseil d’Etat censure cette attitude. Il juge que l’autorité administrative ne pouvait revenir sur sa décision initiale de ne pas infliger de sanction sans enfreindre le principe non bis in idem.

CE, 30 décembre 2016, ACNUSA, req. n° 395681

Contentieux des mesures de résiliation du contrat : application de la jurisprudence Proresto aux instances en cours

Le Conseil d’Etat juge qu’un recours administratif exercé à l’encontre d’une mesure de résiliation d’un contrat administratif n’a pas pour effet d’interrompre le délais de recours contentieux, qui est de deux mois à compter de la notification de la décision (Conseil d’Etat, 30 mai 2012, SARL Proresto, req. n° 357151).

Dans un arrêt du 15 décembre 2016, le Conseil d’Etat précise que cette solution est applicable aux instances qui étaient en cours à la date à laquelle elle a été prise.

Par ailleurs, dans le même arrêt, le Conseil d’Etat souligne que le juge administratif ne peut relever d’office une situation de compétence liée, ce qui a pour effet de rendre inopérants les moyens dirigés contre une décision administrative, sans avoir préalablement invité les parties à présenter des observations.

CE, 15 décembre 2016, Commune de Saint Denis d'Oléron, req. n° 389.141

Persistance du domaine public virtuel

Selon l’arrêt Eurolat (CE, 6 mai 1985, Association Eurolat Crédit Foncier de France, req. n° 41589, n° 41699), le seul fait, pour une personne publique, d’avoir prévu, de façon certaine, d’affecter un immeuble lui appartenant à un service public et de réaliser à cette fin un aménagement spécial, ou d’affecter l’immeuble à l’usage direct du public et, si cette affectation nécessitait un aménagement, de le réaliser, soumettait cet immeuble aux principes de la domanialité publique.

C’est ce que le doctrine désigne comme le domaine public « virtuel ».

Le code général de la propriété des personnes publiques, a restreint la définition du domaine public.

Le Conseil d’Etat avait confirmé que l’entrée en vigueur de ce code n’avait pas pour effet d’entrainer le déclassement des biens qui appartenaient antérieurement au domaine public virtuel (CE, 3 octobre 2012, Commune de Port-Vendres, req. n° 35391).

Par une décision du 14 novembre 2016 (req. n° 4068), le Tribunal des conflits confirme cette analyse.

Lire la décision sur le site Légifrance

 

Responsabilité du maître d’ouvrage délégué

Par un arrêt du 26 septembre 2016, Société Dumez Ile-de-France (req. n° 390515), le Conseil d’Etat précise les conditions d’engagement de la responsabilité du maître d’ouvrage délégué, qui agit pour le compte du maître d’ouvrage.

Il juge que les constructeurs ne peuvent engager la responsabilité contractuelle du maître d’ouvrage délégué pour obtenir la réparation de préjudices consécutifs à des fautes du mandataire du maître d’ouvrage dans l’exercice des attributions qui lui ont été confiées sur le fondement de l’art. 3 de la loi MOP.

Ils peuvent seulement engager la responsabilité du maître d’ouvrage.

Lire la décision sur le site Légifrance

 

Communication des documents administratifs : qui peut contester ?

Les demandes de communication de documents administratifs sont accueillies de plus en plus favorablement, et cette transparence, imposée parfois par voie juridictionnelle, ne peut qu’être saluée.

Il n’en reste pas moins qu’une telle communication peut avoir des effets sur des tiers. Par exemple, les contrats passés par l’administration avec des sociétés privées sont susceptibles de contenir des informations commerciales que le cocontractant ne souhaite pas voir divulguer. Or, ce tiers n’est souvent pas partie à la procédure.

Pour remédier à cet inconvénient, le Conseil d’Etat a jugé qu’une personne directement concernée par des documents dont un tribunal a enjoint la communication à un requérant pouvait faire tierce opposition du jugement.

Lire le texte sur le site Légifrance

Régularisation d’une décision irrégulière attribuant une subvention

Le Conseil d’Etat poursuit sa jurisprudence tendant à limiter les effets des irrégularités de forme et de procédure sur les décisions administratives.
Dans une décision du 1er juillet 2016, il juge qu’une collectivité ayant attribué une subvention affectée d’un tel vice de légalité externe peut, pour des motifs de sécurité juridique, régulariser le versement de la subvention annulée.
Dès lors, la juridiction, saisie de conclusions tendant à ce qu’il soit enjoint à l’administration de recouvrer la subvention attribuée, doit subordonner la restitution de la somme réclamée à l’absence d’adoption par l’administration,dans le délai déterminé par sa décision, d’une nouvelle décision attribuant la subvention.
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